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LE BANC

 

 

Face à la mer, au grand large, aux cieux, j’attends. J’attends nuit et jour, à genoux, j’attends trop souvent … seul.

 

Je connais la pluie, le froid, le gel. Le soleil brûlant de l’été ronge mes jambes de bois et le vent tourbillonnant dépose chaque année dans mes bras quelques feuilles d’or au moment où les jours réduisent lentement leur lumière.

 

Que de confidences, je garde en secret ! Mon cœur en pin les a incrustées au plus profond de mes fibres. Des pensées, aussi j’ai ressenti, s’échappant de promeneurs solitaires venus trouver repos et quiétude au creux de mes bras. Je leur ai apporté une petite pause lors de leur marche, et leurs yeux ont dansé parcourant les douces formes des nuages qui s’éloignent vers l’horizon.. La mer, immense tapis mouvant m’a toujours bercé, me berce toujours. Du haut de cette falaise que les mouettes n’osent atteindre, je contemple les humeurs dansantes des flots par les jours de tempête quand les vagues se fracassent contre les rochers en gerbe d’écumes comme un cadeau offert au ciel. Toujours ce même chant, identique, ne faiblissant jamais, résistant aux marques du temps, aux années qui érodent impitoyablement les hommes.

 

Quelques moineaux viennent parfois picorer des miettes de pain, restes d’un repas frugal de randonneurs qui, dans ce décor somptueux l’ont dégusté lui trouvant une saveur jusqu’alors inconnue.

 

 

Les rires des enfants qui virevoltent autour de moi chassent ma solitude. L’écho de leur voix dans l’azur se mêle au chant des mouettes pour les emporter dans les rares nuages épars.

 

J’exulte à l’aube et au crépuscule quand tout le ciel se pare de doux dégradés, voiles de cyan, vert, jaune, violet, rouge incarnat. Les cieux s’enflamment souvent ourlant quelques nuages de lumière orange vif qui dansent lentement sous le souffle du vent.

 

Vers l’infini, j’attends, immobile, contemplant la nuit, la voûte céleste qui scintille de millions d’étoiles. Je me perds dans le firmament oubliant mes pieds rivés au sol.

 

J’ai oublié mon âge, je ne compte plus les jours ni les saisons identiques. Seules, quelques échardes qui blessent involontairement les rares passants me rappellent que je ne suis plus au printemps de ma vie.

 

Je ne connaitrais jamais le tumulte de la ville, ses odeurs qui auraient imprégné ma peau, m’étouffant jour après jour. Qu’importe cette solitude parfois pesante ! Banc je suis. Ma vie aura chaque jour connu le bonheur d’avoir devant moi l’horizon sans fin et le littoral à mes pieds. Mes genoux restent et resteront à tout jamais pliés du haut de cette falaise remerciant le ciel, l’immensité.

 

                                  CRIS (protégé par Copyright)

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